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« portée à Rome et déposée dans le Panthéon. On la scia « pour former deux pendans d'oreille à la Vénus de ce tem«ple; et la moitié d'un des soupers de Cléopâtre et d'An<< toine fit la parure d'une déesse. »

Terminons par un dernier trait qui prouve combien Cléopâtre était attachée à Antoine. Cependant celui-ci avait toujours quelques craintes qu'elle ne l'empoisonnât. Lorsqu'il mangeait avec elle, il avait coutume de faire faire l'essai des mets qu'on lui servait. Cléopâtre se joua de ses frayeurs et de ses précautions. Un jour, dans un repas, elle se mit sur la tête une couronne' dont les fleurs étaient empoisonnées par les extrémités. Vers la fin du souper, elle invite Antoine à boire les couronnes; il y consent, et prend la couronne de Cléopâtre, dont il effeuille les fleurs dans sa propre coupe. Déjà il la portait à sa bouche, lorsque la reine, lui saisissant le bras, l'arrête et lui dit : « Connaissez « celle contre laquelle vous nourrissez d'injustes soupçons; « si je pouvais vivre sans vous, seigneur, manquerais-je d'oc«casions et de moyens? » En même temps elle fait venir un esclave, lui ordonne de boire la coupe d'Antoine. Le malheureux avale la fatale liqueur et expire à l'instant.

Chez les Romains, dans les repas d'appareil, les convives se couronnaient de fleurs. Dans le principe, on n'en mettait qu'une seule sur la tête; mais, par la suite, on en passa une seconde au cou et sur la poitrine, pour mieux jouir de l'odeur des fleurs. Les couronnes conviviales étaient composées de toutes sortes de fleurs, particulièrement de roses; il y en avait aussi en or et enrichies de pierreries. C'étaient de jeunes esclaves qui distribuaient les couronnes au commencement du repas.

2 Boire les couronnes équivalait, chez les anciens, à ce que les modernes appellent porter un toast, porter une santé. On effeuillait les fleurs de sa couronne dans une coupe remplie de vin, et on la passait aux convives, qui en buvaient quelques gouttes successivement, après avoir prononcé les vœux d'heureuse santé ou de bonheur. Voulait-on saluer particulièrement un convive, on mettait du vin dans sa coupe, on la portait à ses lèvres, et, après en avoir goûté, on la lui envoyait pour qu'il l'achevât.

Je ne m'étendrai pas davantage sur le luxe et la somptuosité d'Antoine et de Cléopâtre dans leurs repas. Je crois avoir réuni ce que l'antiquité nous a laissé de plus essentiel à ce sujet. Ces deux personnages terminèrent leur carrière par le suicide fin digne de couronner une vie agitée par les tourmens de l'ambition et souillée de mille crimes. Ils avaient étouffé le remords sous le poids des délices, des voluptés et des plaisirs en tous genres. Ce tragique événement eut lieu le même jour à Alexandrie, l'an 724 de Rome, 36 ans avant J. C. Antoine finit ses jours par le fer, à l'âge de 53 ans. Cléopâtre termina les siens par la piqûre d'un aspic, selon la tradition commune, et par le poison selon d'autres; née en 685, elle était âgée de 39 ans.

Après leur mort, l'Égypte devait appartenir à Césarion, fils de Jules César et de Cléopâtre; mais Auguste, sur l'avis du philosophe Arius, fit périr le jeune Césarion, âgé de 18 ans; et l'Égypte fut réduite en province romaine.

PEIGNOT, de Dijon.

DES REDEVANCES EN FRANCE

DURANT LE MOYEN AGE.

Il n'est peut-être pas un petit angle de terre dans notre pays qui n'ait été l'objet de transactions desquelles des redevances plus ou moins étranges ont été le résultat. On sait que, sous le règne de François Ier, le célèbre chancelier Du Prat voulut établir en principe qu'il n'y avait point de terre sans seigneur, et que le franc-aleu n'existait en France nulle part: principe du gouvernement despotique établi en Turquie, et que Louis XIV semblait proclamer lorsqu'il disait : l'État, c'est moi.

Nous avons un volume de l'avocat Furgole, entièrement écrit pour prouver que quelques parties du Bordelais (ancienne Guienne) conservaient le franc-aleu, sous le règne de Louis XIV.

A compter de Hugues Capet, tous les actes d'inféodation contenaient des réserves en faveur du propriétaire qui se désaississait. Quelquefois ces réserves ne peuvent être considérées que comme des stigmates de vasselage qu'on voulait attacher au domaine fieffé, sans qu'il en résultât aucun profit réel pour le vendeur ou le donateur.

On appelait de nombreux témoins, souvent d'illustres chevaliers, pour signer l'acte par lequel l'inféodé s'obligeait à donner, à jour fixe, une paille ou un fétu.

C'était, ici, un levrier blanc, un lapin, un chien avec certaines oreilles, un cerf, un épervier; là, un arc avec une corde d'étoupe, une lance, des gantelets, des éperons dorés, comme les chevaliers seuls avaient le droit d'en porter.

Louis XI donna la seigneurie de Châtres, aujourd'hui Arpajon, à Louis de Graville son chambellan, sieur de Montaigu, à la charge par le dict sieur et ses hoirs de nourrir pour Nostre Majesté une levrière et d'amener icelle à Nous ou à nos successeurs avecque les levrons icelle aura faicts et allaictés, quand de ce le dict sieur sera requis. (Lettres datées de Montil-lez-Tours; avril 1472.)

que

Quelquefois ces redevances qui semblaient, au premier abord, fort peu de chose, étaient comme les pierres d'attente de longs et ruineux procès. Il ne fallait oublier ni le jour, ni l'heure, ni la manière de présenter cette paille, ce fétu. Vous offriez le fétu féodal de la main droite, en employant le pouce et l'index; l'acte d'inféodation voulait que ce fût de la main gauche, en employant l'index et lauriculus. Vous n'aviez pas rempli vos engagemens. Il fallait plaider au baillage, à la prévôté, au parlement, vous perdiez votre cause, vous étiez dépossédé.

Quelques redevances consistaient en des objets de peu de valeur, mais difficiles à trouver. Le seigneur féodal

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n'exigeait plus qu'un lapin; mais il fallait que cet animal eût l'oreille droite blanche, et l'autre noire. L'inféodé apportait un lapin avec les marques convenues. Aussitôt on dispute, on plaide pour savoir si l'oreille noire n'est pas teinte. Le lapin est mis en fourrière, il meurt pendant les dix années que dure le procès; on l'écorche; le greffe conserve sa peau qui se corrompt et laisse tomber le poil : expertise contre expertise, tierce expertise. Il faut transiger, et supporter de nouvelles redevances.

Certains vassaux de l'abbesse de Remiremont devaient lui apporter, tous les ans, un plat de neige à la Saint-Jean d'été. S'ils n'avaient pas eu le talent de conserver de la neige, ils devaient conduire à l'abbaye une paire de taureaux blancs. Je remarquerai à ce sujet que nos ancêtres des xm et XIVe siècles recherchaient, plus que les Français modernes, les boissons glacées durant la saison chaude. Souvent ces anciennes redevances sont un témoignage de l'humeur joyeuse de nos bons aïeux.

Boissieu, dans son ouvrage intitulé: De l'usage des Fiefs, rapporte qu'un vassal des environs de Paris était obligé, pour tout devoir féodal, de contrefaire l'ivrogne, de danser à la manière des paysans et de chanter une chanson gaillarde, devant la femme de son seigneur suserain.

Il faut ranger dans la même catégorie la servitude imposée à un certain Beaudouin, de faire à jour et heures fixes, un saut, une grimace et un petit p.. ( bombulus )...... Ce seraient des monumens historiques fort curieux que les quitus délivrés pour de pareilles redevances.

Les vassaux du sire de Pincé devaient, chaque année, présenter leur joue pour recevoir, si bon lui semblait, une chiquenaude ou un soufflet.

A Rouen, les Célestins avaient droit de passage avec une charrette chargée, pourvu qu'en passant ils jouassent du flageolet; et c'est peut-être là l'origine, long-temps cherchée, du proverbe : Voilà un plaisant Celestin!

Les Jongleurs qui entraient à Paris, du temps de Saint

Louis, s'exemptaient du droit de péage en chantant un couplet devant les péagers. C'était une manière, comme une autre, d'encourager en France la culture de la musique. Aujourd'hui, notre fisc est moins gai.

Cela nous fait souvenir que, dans la même époque, les bateleurs (joculatores) qui entraient dans la Capitale, pour obtenir la remise d'un péage de quatre deniers, étaient tenus de faire danser leurs singes devant les percepteurs du droit. Telle est l'origine du proverbe : Payer en monnaie de Singes.

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« vreux,

J'ignore, dit Saint-Foix, si un chanoine dont il est « souvent parlé dans les registres de la cathédrale d'Esous le nom de Jehan Bouteille, mourut une « bouteille à la main; mais on voit, dans ces registres, qu'il << fonda un Obit, accompagné d'une cérémonie assez sin« gulière. Pendant cet Obit, on étendait sur le pavé, au << milieu du chœur, un drap mortuaire aux quatre coins du« quel on mettait quatre bouteilles pleines du meilleur « vin, et une cinquième au milieu, le tout au profit des «< chantres qui assisteraient à ce service. »

«

Au lac de Grandlieu, près de Machecou, ceux à qui le seigneur louait son droit de pêche étaient obligés de venir, tous les ans, danser une danse que l'on n'eût point encore et chanter une chanson que l'on n'eût point encore entendue, sur un air qui ne fût point encore connu. L'amour du nouveau est de tous les âges.

vue,

Tout le monde sait que nos rois avaient auprès d'eux des fols en titres d'offices, appelés quelquefois les joyeux du Roi. Dans les archives de la ville de Troyes, en Champagne, on conservait encore, vers le milieu du dernier siècle, l'original d'une lettre de Charles V, surnommé le Sage; elle est ainsi conçue :

<< Charles le Quint, par la grâce de Dieu, Roy de France, «< A leurs seigneuries les Maires et Eschevins de nostre « bonne cité de Troyes, Salut et Dilection.

« Sçavoir faisons à leurs dessus dictes seigneuries que

a

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