« Tu vois, dit le vieillard, dans ces ombres légères » Les héros renommés dont nous serons les pères, » Ces princes que les chefs du peuple Ausonien » Se plairont à former de leur sang et du mien. >> Le premier que le sort appelle à la naissance, » C'est ce jeune guerrier, appuyé sur sa lance, » Doux fruit de tes vieux ans, roi, père et fils des rois ; » Enfant de Lavinie, il naîtra dans les bois; >> Long-temps dominera dans Albe sa patrie. Après lui vois Procas prendre son noble essor, » Le généreux Capys devancer Numitor. Nul ne démentira sa noble destinée. » Parmi tes descendans je vois un autre Énée : Vaillant comme son père, et comme lui pieux, » Il aimera la gloire, il servira les dieux; » Mais, helas! repoussé par les destins contraires, » Il montera trop tard au trône de ses pères. » Admire la vigueur de ces jeunes guerriers ; Leur front paisible encor n'est pas ceint de lauriers; » Mais d'un feston plus doux le chêne les couronne. >> Ils partent : de ses tours Nomente s'environna ; Hi tibi Nomentum, et Gabios, urbemque Fidenain; Pometios, castrumque Inui, Bolamque, Coramque. 9 Progenies, magnum cœli ventura sub axem. » Ils forment vingt cités pour vingt peuples heureux, » Et Gabie, et Fidène, et ce séjour fameux » Où de la chasteté brillera le modèle; » D'autres, pour augmenter leur puissance nouvelle, Pour » Naîtra du sang de Troie et du dieu des combats? » Voyez-vous sur son front ces aigrettes flottantes, » De la faveur du ciel ces marques éclatantes, » Cet aspect vénérable et cet air de grandeur Où Jupiter lui-même imprime sa splendeur ? » C'est Romulus : c'est lui par qui Rome immortelle » Du haut de sept monts rassemblés autour d'elle, » Portera notre gloire à nos derniers neveux, »Son sceptre au bout du monde, et son nom jusqu'aux cieux; Rome, reine des rois; Rome en héros féconde, La terreur, la maîtresse et l'exemple du monde. Telle, aux jours glorieux de ses solennités, » Fière et s'environnant de cent divinités, Hic vir, hic est, tibi quem promitti sæpius audis, » Sur son char triomphant, la féconde Cybèle Contemple avec orgueil une race aussi belle, » Et dans ses petits-fils embrasse autant de dieux, » Du noble sang d'Iule innombrables enfans. » Les lieux où le jour meurt, où l'aurore commence, Ajoutent leur empire à son empire immense; D » Et son char, loin du cercle où Phébus fait son tour, >> Atteindra des climats que n'atteint pas le jour. » Déjà de l'avenir perçant la nuit profonde, » Les oracles sacrés le promettent au monde, |