On forme un bouclier impénétrable, immense, Et seul contre une armée invincible défense: Sept couches d'un métal que la flamme a durci S'appliquent sous leurs mains sur son orbe épaissi. Chacun a ses emplois, et pour hâter l'ouvrage Entre leurs bras actifs le travail se partage: Les uns placent l'enclume, et leur antre en gémit; D'autres trempent l'acier dans le flot qui frémit ; D'autres, tenant en main la tenaille mordante, A leurs coups répétés offrent la masse ardente; L'autre nourrit les feux dans leur brûlant séjour; L'autre enfermant les vents, les chassant tour à tour, Irrite des brasiers les flammes paresseuses.
Tout agit, tout s'empresse, et leurs mains vigoureuses, Tantôt levant, tantôt baissant leurs lourds marteaux, Retombent en cadence, et domptent les métaux. Tandis Vulcain que presse et dirige l'ouvrage, Évandre dort encor sur son lit de feuillage; Les oiseaux, de son toit hôtes harmonieux, Et les premiers rayons qui redorent les cieux, Ont hâté son réveil. Sur ses pieds, qu'il embrasse Un brodequin toscan se renoue avec grâce;
Tum lateri atque humeris Tegeæum subligat ensem, Demissa ab lævå pantheræ terga retorquens.
Nec non et gemini custodes limine ab alto Procedunt, gressumque canes comitantur herilem.
Hospitis Æneæ sedem et secreta petebat, Sermonum memor et promissi muneris, heros. Nec minus Æneas se matutinus agebat. Filius buic Pallas, illi comes ibat Achates. Congressi jungunt dextras, mediisque residunt
Edibus, et licito tandem sermone fruuntur. Rex prior hæc :
Maxime Teucrorum ductor, quo sospite numquam Res equidem Troja victas aut regna fatebor, Nobis ad belli auxilium pro nomine tanto Exiguae vires: hinc Tusco claudimur amni; Hinc Rutulus premit, et murum circumsonat armis. Sed tibi ego ingentes populos opulentaque regnis Jungere castra paro: quam fors inopina salutem
De l'épaule au côté son glaive est suspendu ; Un long poil tàcheté sur son dos étendu, Jadis d'un léopard la superbe parure, Ramène sur son sein son épaisse fourrure; Et deux chiens affidés, qui ne le quittent pas, Bondissent sur sa trace ou devancent ses pas. Empressé d'accomplir sa parole donnée, Dans son nocturne asile Évandre cherche Énée. Au-devant de ses pas, du lieu de son repos, Avec la même ardeur s'avance le héros. L'un vient avec Pallas, l'autre est suivi d'Achate. Un transport mutuel dans leurs regards éclate; Tous deux en s'embrassant renouvellent leur foi; Tous deux, demeurés seuls dans le palais du roi, De leurs nobles projets, pesés par la prudence, Peuvent se faire entr'eux l'entière confidence. Le roi commence ainsi : « Fier successeur d'Hector, » Vous par qui Troie en cendre ose espérer encor, >> Vous par qui le vaincu se promet la victoire, » Mes moyens ne sont pas dignes de votre gloire; » Le Tibre d'un côté, protecteur des Toscans, » Borne ici mes états, et jusque dans mes camps
Ostentat; fatis huc te poscentibus affers.
Haud procul hinc saxo incolitur fundata vetusto Urbis Agyllinæ sedes, ubi Lydia quondam Gens, bello præclara, jugis insedit Etruscis. Hanc multos florentem annos rex deinde superbo Imperio et sævis tenuit Mezentius armis,
Quid memorem infandas cædes, quid facta tyranni Effera! Dî capili ipsius generique reservent! Mortua quin etiam jungebat corpora vivis, Componens manibusque manus atque oribus ora, Tormenti genus! et sanie taboque fluentes Complexu in misero longâ sic morte necabat. At fessi tandem cives infanda furentem Armati circumsistunt ipsumque domumque : Obtruncant socios; ignem ad fastigia jactant. Ille inter cædem Rutulorum elapsus in agros Confugere, et Turni defendier hospitis armis. Ergo omnis furiis surrexit Etruria justis ;
» Les Rutules de l'autre apportent les alarmes;
» J'entends d'ici leurs cris et le bruit de leurs arines. » Mais un hasard heureux nous assure aujourd'hui » D'un peuple belliqueux l'intérêt et l'appui; » Et le Destin ici semble exprès vous conduire. » Cité riche autrefois, siège d'un grand empire, Séjour heureux long-temps des braves Lydiens, Agylle ici commande aux monts étruriens;
Dépouillée aujourd'hui de sa splendeur antique, » Mézence l'asservit à son joug tyrannique. » Comment peindre l'horreur de son règne odieux? » Puisse tomber sur lui la vengeance des dieux! » Ce monstre, joignant l'art avec la barbarie, » D'un tourment tout nouveau repaissoit sa furie : >> Des vivans joints aux morts sur des lits inhumains, » La bouche sur la bouche, et les mains sur les mains, » Tout dégouttans d'un sang qui faisoit ses délices, » Mouroient d'un long trépas dans ces affreux supplices; » Et le monstre auprès d'eux goûtoit tranquillement » De ces corps déchirés l'horrible accouplement. » Son peuple enfin lassé du poids de tant de crimes, >> S'arme contre un tyran, et, vengeant ses victimes,
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