» L'ordre sacré, lui seul, put m'arracher à vous. » Arrêtez! pourquoi rompre un entretien si doux? >> Laissez-moi prolonger cette douce entrevue. » Pour vous pleurer encor mes yeux vous ont revue, » Et je vous entretiens pour la dernière fois ! » Ainsi, mêlaut de pleurs sa douloureuse voix, Il parloit. Didon garde un farouche silence, Se détourne en fureur de l'objet qui l'offense; Et ses yeux, d'où partoient des regards courroucés, Demeurent vers la terre obstinément baissés: Le marbre de Paros n'est pas plus inflexible. Enfin elle s'échappe, et son ame sensible Retourne au fond des bois, à ses douleurs si doux, Jouir des tendres soins de son premier époux. Le héros plaint tout bas sa triste destinée, Et suit long-temps des yeux cette ombre infortunée Mais il reprend sa route ; il arrive en ces lieux Où la valeur jouit d'un repos glorieux. Il y voit Parthénope et le vaillant Tydée, L'ombre du pâle Adraste encore intimidee: Il reconnoît surtout ces généreux Troyens Que moissonna le fer dans les champs Phrygiens; Dardanidæ ; quos ille omnes longo ordine cernens, Ingemuit; Glaucumque, Medontaque, Thersilochumque Nec vidisse semel satis est: juvat usque morari, Atque hîc Priamiden laniatum corpore toto Ora, mauusque ambas, populataque tempora raptis Vix adeo agnovit pavitantem, et dira tegentem Glaucus avec Médon, Thersiloque son frère; Idée, enfin, qu'on voit, pour charmer ses regrets, Sanglant, percé de coups, reste affreux de lui-même, Son corps tout mutilé n'est plus qu'un tronc hideux; Et son nez, disparu de son affreux visage, Deiphobe armipotens, genus alto a sanguine Teucri, Ad quæ hæc Priamides: Nihil o tibi, amice, relictum; Sed me fata mea et scelus exitiale Lacænæ His mersere malis; illa hæc monumenta reliquit. Egerimus, posti; et nimiùm meminisse necesse est. Pergama, et armatum peditem gravis attulit alvo ; Tout honteux, il recule, et, détournant son front, Et la voix d'un ami console ainsi sa peine : Noble fils de Priam, ah ! parle, réponds-moi; >> Quel monstre assouvissant sa rage impitoyable >> S'est fait de ton supplice un plaisir execrable? » A cet excès d'horreur porter sa barbarie? >> Est-ce un tigre? est-ce un homme? Hélas! on m'avoit dit Que dans la nuit qui fut notre dernière nuit, » Sanglant et fatigué d'un immense carnage, » Toi-même avois péri dans ce confus ravage. » J'honorai ta mémoire ; et, d'une triste voix, >> Auprès d'un vain tombeau je t'appelai trois fois. >> Ton nom y vit encor; mais tes amis fidèles >> N'ont pu mêler ta cendre aux cendres paternelles; Je n'ai pu découvrir tes restes malheureux!»> Deiphobe répond: « Ami trop généreux! » Tes soins compatissans (pouvois-je plus attendre?) |