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Curæ numen habet, justumque memorque precatur.

Nox erat, et placidum carpebant fessa soporem (55
Corpora per terras; silvæque et sæva quiêrant
Equora; cùm medio volvuntur sidera lapsu;
Cùm tacet omnis ager; pecudes, pictæque volucres,
Quæque lacus latè liquidos, quæque aspera dumis
Rura tenent, somno positæ sub nocte silenti
Lenibant curas, et corda oblita laborum.

At non infelix animi Phoenissa (56); neque umquam
Solvitur in somnos, oculisve aut pectore noctem (57
Accipit: ingeminant curæ; rursusque resurgens
Sævit amor, magnoque irarum fluctuat æstu.
Sic adeò insistit, secumque ita corde volutat :
En quid ago? rursusne procos irrisa priores (58
Experiar? Nomadumque petam connubia supplex,
Quos ego sim toties jam dedignata maritos?
Iliacas igitur classes atque ultima Teucrùm
Jussa sequar? quiane auxilio juvat antè levatos,
Aut bene apud memores veteris stat gratia facti?
Quis me autem, fac velle, sinet? ratibusve superbis
Invisam accipiet? Nescis, heu! perdita, necdum

Ces dieux justes, vengeurs des malheureux amours.
La nuit avoit rempli la moitié de son cours;
Sur le monde assoupi régnoit un calme immense;
Les étoiles rouloient dans un profond silence;
L'aquilon se taisoit dans les bois, sur les mers;
Les habitans des eaux, les monstres des déserts,
Des oiseaux émaillés les troupes vagabondes,

Ceux qui peuplent les bois, ceux qui fendent les ondes,
Livrés nonchalamment aux langueurs du repos,
Endormoient leurs douleurs, et suspendoient leurs maux
Didon seule veilloit; la noire solitude

Aigrit de ses chagrins l'ardente inquiétude.
De l'amour renaissant le terrible réveil
A ses yeux, à son cœur, refuse le sommeil.
De ses sens agités la tempête s'augmente;
En butte à tous les coups de l'horrible tourmente,
D'espérance, d'effroi, d'amour et de fureur,
Un reflux orageux bouleverse son cœur;
Et son esprit flottant roule ainsi ses pensées,
Admises tour à tour, tour à tour repoussées :

Que faire, hélas! Irai-je, abaissant mon orgueil,
>> Chez Iarbe, à mon tour, implorer un coup-d'œil,
» Ou des rois mes voisins mendier l'hyménée,
» Eux que j'ai tant de fois dédaignés pour Énée?
» Pour suivre les Troyens, dois-je fuir de ces lieux,
» Me mettre à la merci de ce peuple orgueilleux?
» En effet, ils ont droit à tant de confiance!

» Mes bienfaits sur leur ame ont eu tant de puissance!

Laomedonteæ sentis perjuria gentis?

Quid tum? sola fugâ nautas comitabor ovantes?
An Tyriis omnique manu stipata meorum

Inferar? et quos Sidoniâ vix urbe revelli

Rursus agam pelago, et ventis dare vela jubebo?
Quin morere, ut merita es ; ferroque averte dolorem.
Tu lacrymis evicta meis, tu prima furentem (59
His, germana, malis oneras, atque objicis hosti.
Non licuit thalami expertem sine crimine vitam
Degere more feræ, tales nec tangere curas!
Non servata fides cineri promissa Sichæo!
Tantos illa suo rumpebat pectore questus.

Æneas celsâ in puppi, jam certus eundi,
Carpebat somnos, rebus jam ritè paratis. (60
Huic se forma dei vultu redeuntis eodem
Obtulit in somnis, rursusque ita visa monere est;
Omnia Mercurio similis, vocemque, coloremque,
Et crines flavos, et membra decora juventâ :
Nate deâ, potes hoc sub casu ducere somnos?
Nec quæ te circum stent deinde pericula cernis?
Demens! nec zephyros audis spirare secundos?

» Et, quand je le voudrois, le pourroient-ils souffrir? » Dans ces vaisseaux ingrats qu'ils m'ont vu secourir, » Les cruels voudroient-ils m'accorder une place? >> Ah! de Laomedon connois la digne race;

Après leurs trahisons, après leurs attentats, >> Malheureuse! peux-tu ne les connoître pas ? » D'ailleurs, suivrai-je seule une foule insolente? » Et mon peuple, jouet de ma fortune errante, » Lui qu'avec tant de peine on arracha de Tyr, » A cet exil nouveau voudra-t-il consentir? >> Malheureuse! bannis un espoir inutile:

>> Meurs, tu l'as mérité; meurs, voilà ton asile.

>> C'est toi, ma sœur, c'est toi qui, cédant à mes pleurs, » M'as livrée à ce traître, as fait tous mes malheurs. » Que n'ai-je pu, grands dieux! dans un chaste veuvage, » Conserver de mon cœur la rudesse sauvage, » Au sein de la vertu fuir ces affreux tourmens! > Mânes de mon époux! j'ai trahi mes sermens!» Tels étoient ses transports et son trouble funeste. Le héros cependant, plein de l'ordre céleste, Pour sa fuite, à regret, avoit tout préparé; Le sommeil, de ses sens enfin s'est emparé : Tout à coup dans un songe il croit revoir Mercure; C'étoit sa voix, son port, sa blonde chevelure, Enfin du jeune dieu tous les traits éclatans. «Eh quoi! fils de Vénus, dans ces affreux instans » Tu dors, tu n'entends pas le souffle du zéphyre! > D'une amante en fureur tu braves le délire!

Illa dolos dirumque nefas in pectore versat,
Certa mori, varioque irarum fluctuat æstu.
Non fugis hinc præceps, dum præcipitare potestas?
Jam mare turbari trabibus, sævasque videbis
Collucere faces, jam fervere littora flammis,
Si te his attigerit terris aurora morantem.

Eia age, rumpe moras: varium et mutabile semper
Femina. Sic fatus, nocti se immiscuit atræ.

Tum verò Æneas, subitis exterritus umbris,
Corripit e somno corpus, sociosque fatigat :
Præcipites vigilate, viri, et considite transtris;
Solvite vela citi. Deus, æthere missus ab alto,
Festinare fugam tortosque incidere funes
Ecce iterum stimulat. Sequimur te, sancte deorum,
Quisquis es, imperioque iterum paremus ovantes.
Adsis o, placidusque juves, et sidera cœlo
Dextra feras. Dixit: vaginâque eripit ensem
Fulmineum, strictoque ferit retinacula ferro.

Idem omnes simul ardor habet: rapiuntque, ruuntque
Littora deseruêre : latet sub classibus æquor :
Adnixi torquent spumas, et cærula verrunt.

Et jam prima novo spargebat lumine terras Tithoni croceum linquens Aurora cubile :

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