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REMARQUES SUR L'EPITRE.

fait dire à Sancy, dans l'endroit que nous examinons, il femble que cet homme, après avoir long-tems contrefait le Catholique, foit pourtant mort de la Religion: Cayet même, qui fait dire & faire à Morlas, dans les dernieres heures de fa vie, mille chofes qui ne fçauroient convenir qu'à un Catholique des plus confirmés, n'oferoit croire que Dieu lui ait fait mifericorde, tant il avoit eu de tort de ne fe déclarer que le propre jour de fa mort, arrivée à Mâcon, le 27 d'Août 1595. Il affure du refte, que le Roy crut avoir perdu un homme habile & fidele en la perfonne de Morlas, qui étoit Confeiller du Roy en fon Confeil d'Etat & Privé & Surintendant des Magasins de France (68). La Vie de Henri de Sponde, compte Morlas parmi les profélites de l'Evêque d'Evreux; & d'Aubigné, qui ne fait quartier à perfonne, prétend que Morlas ne fut pas feulement l'un de ceux qui folliciterent le plus Henri IV, en 1593, à changer de Religion, mais qu'il avoit déja précedemment gné le Baron de Salignac, au voyage d'Allemagne, en 1591, en aigriffant ce dernier contre le Vicomte de Turenne, qui y alloit avec eux folliciter du fecours contre la Ligue.

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(68) Chronologie Novenaire, Tom. 3, f. 359, & fuiv.

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PREFACE

SUR LA CONFESSION DU SIEUR DE SANCY.↔

Es faits Hiftoriques qui fe trouvent semés çà & là dans certains Livres de Satyres, font ordinairement couverts d'un voile myfterieux, qui les rend fort difficiles à entendre. La Confeffion de Sancy eft, fans contredit, un de ces Ouvrages mysterieux. C'est une Satyre fine & délicate, remplie d'allufions à des faits particuliers que l'Auteur défigne en paffant, & qu'il ne raconte qu'à moitié, foit pour en faire mieux fentir le ridicule, foit pour foutenir le perfonnage qu'il prend dans toute la Piece. Ces faits ainfi menagés, compofent prefque tout le fel de cette Satyre. Mais en même-tems, cette maniere de raconter les chofes, les déguise fi fort, qu'on a bien de la peine à les reconnoître ; ceux même qui en ont été les témoins oculaires ne sçauroient quelquefois les bien démêler.

Il n'eft pourtant pas impoffible d'éclaircir la plupart des endroits de cette ingénieuse Saty

(1) Cette Préface eft de M. le Duchat, Réfugié François à Berlin, comme

re, nous l'avons marqué dans la Préface. Nous lui devons quelques autres Ouvrages.

re,

fi l'on veut s'y appliquer avec quelque foin. Cette forte d'étude eft fans doute péni ble & dégoutante: car, combien de recherches, combien de conjectures inutiles n'hazarde-t'on point? Il faut confulter tous les Historiens de ce temps-là, l'efprit toujours tendu laiffer échapper un fait, qui, pour pour ne pas être mêlé parmi quantité d'autres, ne paroît pas d'abord être celui que vous cherchez. Un nom un peu déguifé; quelque diverfité dans la maniere dont un fait eft raconté, le font méconnoître. En un mot, c'est marcher à tâtons que de s'appliquer à débrouiller de femblables Livres.

Ces difficultés ne m'ont toutefois pas empêché de travailler à l'éclairciffement de prefque toute la Confeffion de Sancy. Comme cette Piece (2) eft encore fort eftimée des Curieux, j'ai crû qu'à mon exemple, quelqu'un plus verfé dans l'Hiftoire de ce tems-là, donneroit au Public l'explication des beaux endroits que je n'ai pû éclaircir: c'eft là le feul but que je me fuis propofé en faisant imprimer ces Re

marques.

Jé puis m'être trompé dans le rapport que j'ai cru trouver entre certains faits qu'on lit ailleurs, & ceux qui font racontés dans la Confeffion de Sancy. Il n'eft rien de si aisé

que

de prendre le change dans ces occafions. Mais au moins puis-je affurer que je n'ai point failli par une trop grande confiance. Je n'ai rien avancé de moi-même; & pour les endroits que j'ai tâché d'éclaircir par mes Remar

(2) Petri Bælii Epift. de Scriptis adefpotis.

ques,

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ques, j'ai pour mes principaux Garans l'Auteur même de cette Piece, ( felon l'opinion commune M. d'Aubigné) dans fon Hiftoire Univerfelle, Edition de 1626, & M. de Thou, impreffion de Geneve.

Du refte, on auroit de la peine à deviner ce qui peut avoir obligé l'Auteur à fatyrifer fi cruellement M. de Sancy, dont M. de Thou parle en plufieurs endroits de fon Hiftoire fort honorablement, s'il n'étoit pas très- évident que d'Aubigné, qui avoit naturellement l'efprit fort fatyrique (3), a fait la principale partie de cette Piece dans le temps qu'il fembloit que le Roy, Henri le Grand, ne fe plût à laiffer ce Gentilhomme dans la pauvreté, fes fervices fans récompenfe, & ses talens fans Occupation, que pour donner toute fa faveur à Sancy, qui, felon d'Aubigné, n'avoit pour tout mérite qu'une aveugle complaifance pour certains penchans de ce Prince. De-là vient auffi que d'Aubigné n'épargne pas non plus le Marquis de Rofny, qui fucceda à Sancy, dans l'administration des Finances, & que l'encre de sa mordante plume rejaillit même très-fouvent jufques fur la face de ce grand Roi, qu'il accufoit (4) d'ingratitude, quoique dans tes, Tom. 1, fur l'an 1598.

(3) Mémoires de M. le Duc de Sully, Tome 1 (4) Sur la reconnoifChap. 79. Tome 2, Chap. fance du Roy Henri IV, 51,& ailleurs. Voyez auffi pour fes anciens ferviteurs, M. de Varillas, en fon Hi-il eft aifé de se satisfaire, ftoire de Henri III, fur l'an par la lecture de l'ingénieu1586. Mais particuliere- fe Apologie de ce Prince, ment M. Benoît, en fon attribuée à Madame de RoHiftoire de l'Edit de Nan-han, [Catherine de Par

dans le fonds rien n'eût tant éloigné ce Monarque de la pensée de faire du bien à d'Aubigné, , que cette inclination qu'il lui connoiffoit à médire d'un chacun.

C'eft-là, felon moi, l'un des grands motifs de la haine que d'Aubigné témoigne contre Sancy dans toute la Piece; mais comme il avoit trop d'efprit pour ne voir pas qu'il falloit donner à cette haine un autre prétexte plus honnête & qui fût plaufible, d'Aubigné, qui avoit toujours fait hautement profeffion de la Religion Proteftante, n'en trouva point de plus vrai-femblable que d'attaquer du côté de la Religion Sancy, qui dans toutes les occafions avoit témoigne ne vouloir fuivre que celle qui s'accommodoit le mieux à fes vûes. d'interêt & d'ambition. C'eft-là en effet le comble de l'impiété, d'où il ne devoit pas être furprenant qu'on vît Sancy le précipiter dans tous les crimes (5) que l'Auteur lui attri

thenay.] Elle eft tirée de deux Editions du Journal de Henri III; fçavoir, de celle de 1666, & de 1693; on l'a rétablie dans cette Edition.

bue:

certain que Sancy a rendu de grands fervices aux Rois Henri III & Henri IV,dans les tems même les plus difficiles : & s'il n'en à pas été dignement récompenfé, il (5) M. le Duchat s'a- faut s'en prendre à Henri bandonne un peu trop à IV, qui s'étoit laiffé prével'efprit de partialité, de s'i-nir contre ce brave Officier; maginer, que le change-foit par Gabrielle d'Eftrées, ment de Religion dans M. foit par M. de Sully. On de Sancy, l'a précipité dans peut avoir recours au Diftoutes fortes de crimes : cours de M. de Sancy, mêc'eft adopter un peu trop me fur l'occurrence de fes légerement l'humeur cauf-affaires, imprimé au T. 3 tique de d'Aubigné. Il eft des Mémoires de Villeroy.

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