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vahi la Cappadoce et la Bithynie, et pardonna, après l'avoir défait, à Déjotarus, roi de la petite Arménie, qui s'était déclaré contre lui; il termina ces deux guerres avec tant de rapidité qu'il ne put s'empêcher de s'écrier: « Heureux Pompée, d'être devenu »grand à si bon marché ! » Il raconta toute cette expédition à ses amis de Rome par ces trois mots qu'il leur écrivit : « Veni, vidi,

vici. »

(AN DE R. 707-708.)

mit enfin; il triompha en même temps pour les Gaules, pour l'Égypte, pour le Pont et pour l'Afrique; on ne parla point de Pharsale. A cette occasion il fit à ses soldats et au peuple d'immenses largesses, et donna des fêtes dont l'éclat et la magnificence surpassèrent tout ce qui s'était fait jusqu'alors. Cependant s'il prodigua l'argent et les terres à ses soldats, s'il avilit le sénat en y introduisant ses centurions gaulois et ses affranchis, il n'abusa point d'ailleurs du pouvoir exorbitant qui lui était abandonné. Bien qu'il fût maître absolu de la république, el que son armée fût son principal appui, il ne consentit, pour plaire aux soldats, à aucune nouvelle proscription; sa clémence fut sans bornes, et ses ennemis même participèrent à ses bienfaits. Cicéron, qui avait refusé de poursuivre la guerre et qui était venu trouver le vainqueur, contribua à le désar

Après ces nouvelles victoires, et deux ans après avoir franchi le Rubicon, César revint à Rome, où sa présence était vivement attendue. Ses lieutenants avaient tout bouleversé pendant son absence; un tribun factieux, Dolabella, soulevait la multitude; sou retour mit fin à tous ces maux. Les soldats, sachant qu'on avait besoin d'eux, se révoltaient, tuaient leurs chefs, pensant tout obtenir; César les accabla d'un seul mot: << Citoyens, »leur dit-il, au lieu de les ap-mer, et obtint, par son éloquence, le rappel peler soldats, « je vous délie de vos serments; >> ceux qui ont fini leur temps seront payés »jusqu'au dernier sesterce. Il n'y en eut point un seul qui ne s'obstinât à le suivre.

Le parti de Pompée était plutôt dispersé que détruit; il se releva en Afrique, où Scipion, Labienus ancien lieutenant de César, Caton et Juba roi de Mauritanie, avaient rassemblé une nombreuse armée. César se rendit dans cette province, mais ne fut vainqueur qu'après des combats multipliés. Cependant six mois après l'Afrique était soumise: Scipion avait péri au moment où il espérait passer en Espagne : Juba, chassé de ses États, avait perdu la vie, et Caton, renfermé dans Utique, avait mieux aimé se donner la mort que de tomber vivant entre les mains de son ennemi (707).

Dictature de César ; sa mort.— Après avoir déclaré la Mauritanie et la Numidie provinces romaines, et donné l'ordre de relever Carthage, César revint en Italie. Reçu à Rome avec les plus vives démonstrations d'enthousiasme, il fut nommé dictateur pour dix ans : on lui conféra la dignité de censeur, et sa personne fut déclarée inviolable. Tant de fois vainqueur, il n'avait point encore triomphé, le temps lui en avait manqué; le repos dont il commençait à jouir le lui per

de Marcellus, de Ligarius et d'autres amis de Pompée. Le rétablissement de l'ordre fut un des soins les plus importants de César : il fit de sages réglements pour encourager la population, pour réprimer le luxe, pour protéger les sciences et les lettres; il réforma, avec l'aide de l'astronome Sosigène, le calendrier dans lequel une erreur de soixantesept jours s'était introduite.

de

Pendant qu'à Rome César se montrait aussi grand magistrat qu'il avait été grand général sur-le-champ de bataille, les fils de Pompée organisaient en Espagne une redoutable résistance. La présence du dictateur audelà des Pyrénées devint indispensable; pour assurer son empire, il lui fallait encore combattre. La bataille de Munda, près de Cordoue, termina la guerre civile (708); mais elle fut si opiniâtrement disputée que, son propre aveu, il combattit moins pour la victoire que pour son salut. Quand il rentra à Rome après six mois d'absence, il put enfin se dire le maître du monde; mais le triomphe qu'il se décerna blessa le peuple, qui se se souvint que cette fois des Romains avaient été vaincus en Espagne. De nouveaux honneurs lui furent cependant prodigués; nonmé dictaleur à vie, il reçut le titre d'empereur et le surnom de Père de la pa

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trie; il lui fut accordé de porter une couronne de laurier, d'assister aux jeux publics sur un siége d'or, d'avoir sa statue à côté de celles des rois, d'être enterré dans l'enceinte sacré des Pomorium. Déjà demi-dieu, il devint dieu tout-à-fait, il eut des temples, des autels et des prêtres, et fut adoré sous le nom de Jupiter Julius. Il ne lui manquait que le titre de roi : il délibéra s'il le prendrait; il avait même en quelque sorte essayé du diadême, mais il recula devant la haine des Romains pour le nom et pour l'appareil de la royauté. Ne voulant donc ni renoncer au pouvoir ni monter sur le trône, il prit un troisième parti, le plus dangereux de tous il se flatta d'éblouir ses concitoyens par un mélange incompatible de liberté et de despotisme. Pour gagner la confiance du peuple et du sénat, il renvoya sa garde espagnole, malgré les conseils de ses amis; il crut que la meilleure garde était la clémence à laquelle il venait d'élever un temple, et seul, sans armes et sans cuirasse, il se promena dans Rome au milieu de ses plus cruels ennemis.

Cependant il méditait les plus vastes projets : il voulait compléter le grand œuvre de l'empire romain, en réunissant, dans un seul code, toutes les lois de Rome, et en les donnant à toutes les nations; il voulait faire construire un temple au milieu du champ de Mars, un amphithéâtre au pied de la roche Tarpéienne, un port à Ostie; ces monuments gigantesques auraient pu recevoir les représentants du monde entier. Une immense bibliothèque, rassemblée à Rome, aurait renfermé tous les trésors de l'intelligence humaine. L'isthme de Corinthe, creusé, aurait réuni les deux mers. Déjà Corinthe et Carthage, victimes de la haine de Rome, se relevaient par son ordre. Trop à l'étroit dans l'Occident, il voulait pénétrer dans la haute Asie, venger sur les Parthes la défaite de Crassus, et renouveler les conquêtes d'Alexandre; au milieu de ces vastes pensées, il fut arrêté par la mort. Quelques hommes qu'il avail comblés de ses bienfaits, un Jun. Brutus, esprit faux, cœur sec, fanalisé par le nom qu'il portait, conjurèrent sa perte, non point pour rétablir une liberté

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qui n'était plus possible, mais pour relever le pouvoir d'une aristocratie corrompue. Les prodiges et les avertissements ne manquèrent point à César; il ne voulut rien croire. le jour même où le complot devait recevoir son exécution (ides de mars, 709), Calpurnie, sa femme, l'avait décidé, par ses prières, à remettre la séance du sénat; un des conjurés survint, lui fit honte de céder à une femme, et l'entraîna. Casca lui porta le premier coup; pendant qu'il luttait avec l'assassin, les autres conjurés tirèrent leurs épées et le percèrent de coups; il se défendit jusqu'au moment où il aperçut, au nombre des meurtriers, Brutus, le plus intime de ses amis, Brutus qui passait pour son fils; à cette vue, il s'écria douloureusement : « Toi aussi, mon fils, » et se couvrit le visage de sa loge. Bientôt il tomba, percé de vingt-trois blessures, au pied de la statue de Pompée. Ainsi périt à l'âge de cinquante-six ans l'un des hommes les plus extraordinaires dont ait parlé l'histoire. Napoléon, dont nous avons rapporté le jugement sur Alexandre, disait : Qu'au rebours du vainqueur de Darius, Cesar avait commencé sa carrière fort tard, et qu'ayant débuté par unc jeunesse oisive et des plus vicieuses, il avait fini montrant l'âme la plus active, la plus élevée, la plus belle; il le regardait, ajoutait-il, comme un des caractères les plus aimables de l'histoire.

Les conjurés avaient cru qu'il suffisait de vingt coups de poignard pour tuer César; el jamais il ne fut plus vivant et plus redoutable que lorsque sa dépouille usée et flétrie eût été percée de coups. Il apparut aux yeux de tous, après cette terrible expiation, ce qu'il avait toujours été, malgré toutes ses souillures, l'homme de l'humanité ! Comme celles d'Alexandre, ses funérailles devaient être sanglantes.

SECOND TRIUMVIRAT; BATAILLE DE PHILIPPES; ÉVÉNEMENTS DEPUIS LA BATAILLE DE PHILIPPES JUSQU'A LA RUPTURE ENTRE OCTAVE ET ANTOINE ; BATAILLE D'ACTIUM; OCTAVE CÉSAR AUGUSTE, EMPEREUR; FIN DE LA RÉPUBLIQUE ROMAINE.

La mort de César ne sauva point la liberté; il arriva qu'il n'y eut plus de tyrans et que la tyrannie exista toujours; la place du maître se trouva seule vacante. Cette mort fut donc un grand malheur, puisque, au lieu du repos dont jouissait l'empire, elle fit naître une guerre civile qui le désola pendant seize ans. Les conjurés, qui n'avaient de plan que pour abattre le dictaleur, sans en avoir pour remplacer son gouvernement, furent obligés de se retirer devant l'indignation populaire, et se réfugièrent au Capitole, où ils firent venir à leur aide une troupe de gladiateurs armés.

-

Rome était divisée en deux partis; l'un complait tous les ennemis de César; l'autre avait pour chefs Antoine et Lépide, qui, sous prétexte de venger leur bienfaiteur, aspiraient à recueillir l'héritage de sa puissance. Lepide; Marc Antoine. Lépide (Marcus Emilius Lepidus), issu de la famille Emilia, la plus illustre et l'une des plus anciennes familles patriciennes de Rome, était parvenu de bonne heure aux premiers emplois de la république, mais il avait dû ce rapide avancement, plutôt au grand nom qu'il portait qu'à ses talents et à ses vertus. Collègue de César dans le consulat, il devint grand-maître de la cavalerie quand le vainqueur de Pompée fut revêtu de la dictature, et reçut le commandement de Rome des mains du dictateur pendant l'expédition de ce dernier en Espagne. Esprit borné autant qu'ambitieux, saus courage, plein de vanité et de fourberie tout à la fois, Lépide se trouvait comme étourdi de son élévation, lorsque la mort de César arriva. Son premier mouvement, néanmoins, fut la crainte; il se sauva de Rome, et ne reparut que lorsqu'Antoine l'eut rassuré.

Antoine (Marcus Antonius) était petitfils du célèbre orateur Marc Antoine, con

AN DE R. 709.)

temporain de Marius; son père mourut avec le surnom de Creticus, qui lui fut ironiquement donné pour s'être laissé battre par les Pirates. Élevé dans la corruption des derniers temps de la république, Marc Antoine fit ses premières armes el commença sa réputation militaire en Syrie, sous Gabinius: il fit en même temps son noviciat de pillage. Se donnant comme descendant d'Hercule, dont il avait et la force et la mâle beauté, toujours vêtu d'une étoffe grossière, armé d'une large épée, buveur intrépide, raillant et sachant supporter la raillerie, il s'asseyait à table avec les soldats, et les charmait par sa familiarité; insatiable d'argent, avide et prodigue en même temps, il volait pour donner à ses amis, ou pour satisfaire son goût effréné pour les plaisirs. Lieutenant de César, il se distingua dans la conquête des Gaules; tribun du peuple, il défendit la cause de son général, qui lui confia plus tard le commandement de l'aile gauche, à Pharsale, et l'ad mit sur son char de triomphe, à son retour d'Espagne. Antoine avait, il est vrai, soutenu la fortune de César, mais personne n'en avait profité aussi insolemment ; rien He fut néanmoins plus lâche que sa conduite dans les derniers temps; il avait eu connaissance de la conspiration contre le dictateur, et, sans vouloir ni la prévenir ni la partager, il avait attendu l'événement. Son équivoque neutralité faillit lui devenir funeste; il aurait partagé le sort de César s'il n'eût eu pour lui Jun. Brutus. Il était consul au moment de l'assassinat : dans les premiers moment de trouble, il prit un habit d'esclave, el se cacha; mais quand il vit que les conjurés n'attentaient à la vie de personne, il se montra, et convia le même jour Brutus à souper. L'hésitation des meurtriers de César réveilla son ambition, et lui fit concevoir l'espérance de s'emparer de la tyrannie. Par une sorte de transaction, le sénal avail confirmé les actes de César, en déclarant néanmoins qu'il ne serait fait aucune recherche sur sa mort; il avait décidé en même temps que les funérailles du dictateur seraient faites aux frais du public et qu'on exécuterait son testament. Mais quand le peuple apprit d'Antoine que César avait

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nommé Décimus Brutus tuteur de son fils adoptif, et que la plupart des assassins étaient institués ses héritiers, quand il vit son corps mutilé et sa robe sanglante, l'indignation fut si forte, que tous les assistants sai sirent les tisons du bûcher pour mettre le feu aux maisons des conjurés qui n'eurent que le temps de fuir. Decimus Brutus se rendit dans son gouvernement de la Gaule Cisalpine; Jun. Brutus, Cassius et les autres se retirèrent en Orient pour recommencer la guerre de Pharsale. Antoine, après s'être aiusi débarrassé des chefs du parti républieain, se chargea d'exécuter les actes du dictatear, dont les dernières volontés furent, pour sa cupidité, l'objet d'un honteux trafic, car il ajoutait chaque jour quelque nouvel article au testament. Voulant néanmoins se ménager l'appui du sénat, il abolit la dictalure, el rappela Sextus Pompée, auquel il fit donner la surintendance des mers; il apaisa Lépide en lui faisant avoir la dignité de grand - pontife. Entouré lui-même de six mille soldats dévoués, il était à peu près maître de Rome, lorsque parut un jeune homme, fils adoptif de César, qui venait réclamer les biens de son père.

Octave. — Oclave (C. Julius César OcLavianus) était fils de C. Octavius et d'Altia, sœur, ou, selon d'autres, tante de J. César; il naquit l'année même où Cicéron sauva la république en déjouant la conjuration de Catilina. Italien par son père, qui tirait son origine de Vélitres (Vellétri), et qui, chevalier de naissance, avait été le prenier de sa famille admis au sénat, après avoir été banquier et usurier, il était Africain. par sa mère, s'il faut en croire ses ennemis, qui disaient «Ton aïeul maternel était africain, la mère faisait aller le plus rude moulin d'Aricie, et ton père remuait la farine, d'une main noircie par l'argent qu'il avait manié à Ferulum (Suétone). » Élevé à Rome, sous les yeux de sa mère et de son beau-père Philippe, Octave prononça à douze ans, dit-on, l'oraison funèbre de sa grandmère Julia mais plus tard il devint tellement timide à la tribune, qu'il eut besoin d'un héraut pour parler au peuple. Petit, frêle, souvent malade, boitant fréquemment

:

d'une jambe, il fut jugé par son onc'e d'une santé trop délicate pour l'accompagner en Espagne, et fut envoyé à Apollonie (Épire), pour continuer ses études, sous le fameux rhiteur Apollodore. La nouvelle de la fin tragique de César lui arriva dans cette ville, i partit aussitôt. En débarquant à Brundusium, il apprit le contenu du testament de son oncle, et se vit entouré par les vétérans, qui le saluè ent héritier et vengeur de leur général; il se rendit à Rome, sans perdre de temps, résolu de faire ratifier ses droits par le sénat. A son approche, magistrats, citoyens, soldats, allèrent à sa rencontre : Antoine, qui crut avoir bon marché d'un enfant, ne bougea pas, l'accueillit avec mépris, refusa de lui remettre les trésors de César, sous prétexte qu'ils étaient devenus la propriété de l'État, et lui défendit inso lemment de se mettre sur les rangs pour le tribunat. Octave ne fit entendre aucune plainte; mais en acquittant sur ses propres biens les legs faits par César au peuple et aux soldats, et en supportant à lui seul l'énorme dépense des jeux ordonnés par son› père adoptif, pour l'inauguration du temple de Venus Genitrix, il se fit de nombreux partisans. Attentif à cacher son but, employant avec une admirable persévérance la ruse et l'hypocrisie, i flatta Cicéron, qu'il appelait son père, il acquit la faveur des sénateurs, et parvint ́ même à raniener vers lui les ennemis de César, qu'effrayaient la tyrannie d'Antoine, et que la protection du sénat rassurait à peine.

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Le dédain qu'Antoine avait témoigné à Octave se changea en crainte, dès qu'il le vit à la tête d'un parti puissant; pour se mettre en mesure, il s'adjugea les gouvernements de la Macédoine et de la Gaule Cisalpine, qu'il enleva aux deux Brutus, et fit venir des troupes en. Italie, menaçaut tout à la fois Octave, les conjurés et la république. Déconcerté par les philippiques que Cicéron lança contre lui du haut de la tribune, il jeta le masque, et se rendit en toute hâte vers la Gaule Cisalpine, pour en chasser Decimus Brutus. Un décret du sénat ordonna aux consuls Aulus Hirtius, et C. Vibius Pansa de marcher au secours de Brutus; Octave

leur fut adjoint en qualité de propréteur; le sénat, par cet acte de politique, perdait tout à la fois Antoine, et Octave auquel il ôtait sa popularité en le forçant combattre pour ¡l'un des meurtriers de son oncle. Après deux batailles gagnées sur Antoine, sous les murs de Modène [711], Octave, qui, dans la première, avait donné lieu de faire soupçonner sa bravoure, mais qui, dans la seconde, avait rempli les devoirs d'un général et d'un soldat, Octave se trouva, par la mort des deux consuls, chef de l'armée victorieuse : celle double mort lui fut si favorable, qu'on l'accusa d'y avoir trempé.

La défaite d'Antoine releva tellement les espérances du parti républicain, que dans le sénatus consulte qui conférait le triomphe à Dec. Brutus, et le chargeait de poursuivre Antoine, Octave ne fut pas même nommé; mais il restait au jeune César et sa politique et ses légions. Loin de poursuivre Antoine, il lui laissa le temps de rassembler des forces, et d'aller rejoindre Lépide au delà des Alpes, et s'en vint lui-même à Rome demander les consulat; n'obtenant que de vagues promesses pour l'année suivante, il fit approcher son armée, et fut nommé consul avant vingt ans. Oclave fit condamner tous ceux qui avaient pris part à la mort de César, et révoquer les décrets portés contre Antoine el contre Lépide. Decimus Brutus avait été tué en Gaule par les émissaires d'Antoine; les républicains se rassemblèrent alors autour de Jun. Brutus et de Cassius, et en appelèrent à leur épée, de la sentence des tribunaux de Rome. Octave, Antoine et Lépide, de leur côté, se réunirent dans une île du Rhenus (Reno), près de Bologne, et délibérérent pendant six jours, sous la garde des vetérans de César. Le second triumvirat fut le résultat de cette conférence [711]. Les nouveaux triumvirs se donuèrent, avec le pouvoir consulaire pour cinq ans, le droit de nommer à toutes les magistratures sans le concours du sénat et du peuple, el se partagèrent les provinces: Oclave prit la Sardaigne, la Sicile et l'Afrique Antoine, la Gaule Cisalpine et les Gaules conquises par César: Lépide eut pour jui la Gaule Narbonnaise et l'Espagne; centre de l'empire, l'Italie ne fut point divisée.

Ce traité fut cimenté par le mariage d'Octave avec Clodia, fille du tribun Clodius et de Fulvie qu'Antoine avait épousée, après la mort de son premier mari.

Après s'être promis mutuellement la tête de leurs ennemis, les triumvirs se dirigèrent sur Rome; chacun y fit son entrée à jour different, accompagné de nombreux satellites. Alors commencèrent des proscriptions bien plus sanglantes et bien plus odieuses que celle de Sylla; Rome fut inondée de sang; Octave abandonna Cicéron à la vengeance d'Antoine, qui lui livra en échange L. César, son oncle maternel; Lépide, de son côté, proscrivit son frère Paullus. Les massacres s'étendirent bientôt sur toute l'Italie; Fulvie, la digne épouse d'Antoine, excitait les bourreaux et insultait aux restes de Cicéron, dont la tête et les mains furent clouées à la tribune aux harangues. L'historien Velleius Paterculus a tracé en peu de mots un affreux tableau de cette époque de terreur : « Il y eut, dit-il, beaucoup de fidélité chez les femmes, assez dans les affranchis, quelque peu chez les esclaves, aucune dans les fils, tant il est difficile d'attendre quand l'espoir est une fois conçu.» Les triumvirs prétendirent justifier ces massacres, en disant qu'au moment de marcher contre Brutus et contre Cassius, ils ne pouvaient laisser d'ennemis derrière eux.

Bataille de Philippes. - Cependant la guerre civile était engagée, et l'empire se trouvait également partagé entre les deux partis, dont l'un occupait l'Italie et les provinces d'Occident, tandis que le second, en possession de tout l'Orient, était de plus maître de la mer par les forces navales de Sextus Pompée. L'Asie n'était pas moins maltraitée par Cassius que l'Italie par les Triumvirs; il avait ruiné cette malheureuse province, en exigeant en uue seule fois les impôts de dix années. Ces cruelles nécessités de la guerre civi'e étaient de véritables tortures pour Brutus, qu'enchaînait la plus implacable des fatalités, celle qu'il s'était imposée par un crime volontaire. Troublé par ses remords, il demandait sans cesse du repos et de la fermeté à cette philosophie stoicienne à laquelle il avait fait tant de sa

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