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La troisième guerre fut également courte et peu sanglante (1733-1738). Elle eut une cause bien éloignée, car elle fut allumée par l'élection contestée d'un roi de Pologne (Stanislas Leczinski). Les rois de France, d'Espagne et de Sardaigne se liguèrent contre l'Autriche, qui fut dépouillée de toutes ses possessions en Italie; les Français, unis aux Piémontais, lui enlevèrent le Milanais; les Espagnols conquirent Naples et la Sicile. Le traité de Vienne (1738), qui mit fin aux hostilités, rendit aux Deux-Siciles une indépendance qu'elles avaient perdue depuis plusieurs siècles, en leur donnant un souverain qui fixa sa résidence dans le pays. Le même traité étendit les frontières du roi de Sardaigne aux dépens du Milanais, qui fut du reste restitué à l'Autriche avec le duché de Mantoue: cette dernière puissance reçut en même temps le duché de Parme en compensation de ce qu'elle avait perdu, et le grand-duché de Toscane fut érigé en principauté indépendante en faveur de François de Lorraine, époux de Marie-Thérèse.

Le repos que le traité de Vienne venait de rendre à l'Italie et au reste de l'Europe, fut bientôt troublé. La mort de l'empereur Charles VI, en qui s'éteignit la branche al lemande de la maison d'Autriche (1740) et la succession disputée de sa fille Marie-Thérèse, mirent l'Europe en feu. Les Bourbons de France, d'Espagne et de Naples, s'unirent au roi de Sardaigne pour chasser les Autrichiens de l'Italie. La lutte fut longue et acharnée; le roi de Sardaigne, dès le principe, quitta l'alliance des Bourbons pour celle de la reine de Hongrie (1743). Enfin, après sept ans de combats, le traité d'Aix-la-Chapelle (1748) donna la paix à l'Italie et fixa les nouveaux rapports des États qui la composaient. Les duchés de Milan et de Mantoue furent rendus à la maison d'Autriche, à l'exception de quelques portions qui en furent détachées en faveur du roi de Sardaigne. Les duchés de Parme et de Plaisance, séparés du Milanais, formèrent une quatrième souveraineté pour la maison de Bourbon et furent donnés à don Philippe, frère du roi d'Espagne et de Naples. La Toscane, cédée au second fils de l'empereur François, devint État indé

pendant dans la branche cadette de la maison de Lorraine. Le duc de Modène et la république de Gènes rentrèrent dans toutes leurs possessions. L'indépendance de l'Italie ainsi morcelée, fut reconnue de droit par les monarques qui avaient réglé son sort; mais par le fait cette indépendance n'exista plus. A dater du traité d'Aix-la-Chapelle jusqu'à la révolution française; l'histoire générale de la Péninsule italique n'offre plus d'événements; il nous reste à passer rapidement en revue celle de chaque état en particulier.

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Savoie. Le duc Victor-Amédée II gouvernait la Savoie depuis 1675; il n'avait néanmoins que trente-quatre ans au commencement du siècle suivant; devenue roi par la cession de la Sicile, et ensuite de la Sardaigne, il fixa long-temps l'attention de l'Europe par la brillante carrière qu'il parcourul. Parvenu à l'âge de soixante-quatre ans, il abdiqua en faveur de son fils CharlesEmmanuel III, voulut ressaisir le pouvoir, fut arrêté par ordre de son successeur, et mourut prisonnier au château de Moncalieri (1750-1752).

Charles - Emmanuel III prit part aux guerres qui désolèrent l'Italie jusqu'au traité d'Aix-la-Chapelle; le reste de son règne jusqu'à sa mort (1773) fut pacifique; il en fut de même de celui de son fils Victor-Amédée III, jusqu'au moment où la révolution française jeta les armées de la république sur le sol italien (1792).

Milan; Mantoue; Parme et Plaisance; Modène et Reggio. Le duché de Milan, ravagé par la guerre, respira sous le gouvernement des empereurs de la maison de Lorraine, gouvernement plus doux et plus éclairé que celui de la maison d'Autriche; l'administration du comte de Firmian (1759-1782) laissa dans le pays d'honorables souvenirs. Le duché de Mantoue enlevé à Ferdinand-Charles de Gonzague, mis au ban de l'Empire (1708), partagea le sort du duché de Milan.

La maison Farnèse s'éteignit avec le duc Antoine (1731). L'infant d'Espagne don Carlos prit alors possession de Parme et de Plaisance; réunis au Milanais (1740), ces deux duchés furent enlevés à la maison

d'Autriche (1749) et donnés à l'infant dou Philippe, fils de la reine d'Espagne, Elisabeth Farnese. Le traité d'Aix-la-Chapelle en garantit la possession à ce prince, qui régna obscurément, et laissa en mourant (1765) son héritage à son fils Ferdinand. Ce dernier, qui avait été élevé par Condillac, céda ses' Etats à la France.

Les duchés de Modène et de Reggio partagèrent toutes les calamités qui désolèrent Italie. Le duc Renaud, fidèle à l'alliance de l'Autriche, fut obligé de fuir deux fois de ses États envahis par les Français (17071734). Rentré dans sa capitale (1736), il mourut quelques mois après, âgé de quatrevingt-deux ans. Son fils, François III, rechercha l'alliance des Bourbons, et fut généralissime des troupes françaises et espagnoles en Italie pendant la guerre contre Marie-Thérèse. Cette alliance fournit aux Autrichiens un motif de s'emparer de ses États et de les dévaster: le traité de 1748 les lui rendit. Il mourut (1780), et eut pour successeur son fils, Hercule III. Celuici, marié depuis quarante ans à l'unique héritière du dernier duc de Massa et Casvara, n'avait qu'une fille, mariée à l'archiduc Ferdinand d'Autriche (1771), et qui resta seule pour représenter la maison d'Este.

Toscane. Toutes les familles souveraines de l'Italie semblaient, depuis plusieurs siècles, frappées par une fatalité irrésistible: on avait vu s'éteindre à Naples les maisons de Durazzo, d'Anjou et d'Aragon; à Milan, les Visconti et les Sforza; au Montferrat, les Paléologue; à Urbin, les Montefeltro et les la Rovère; à Mantoue, les Gonzague; à Parme et à Plaisance, les Farnèse; à Modène, les d'Este nous allons voir les Médicis finir à Florence.

Cosme III régnait depuis 1670. Malheu reux dans son union avec Marguerite d'Orléans, il eut encore la douleur de voir mourir avant lui son fils aîné, Ferdinand; son second fils, Jean-Gaston, n'avait pas d'enfants, non plus que sa fille, épouse de l'électeur palatin. Pour prévenir l'extinction de sa famille, Cosme détermina son frère FrançoisMarie à déposer la pourpre romaine, et à épouser, quoique âgé de plus de cinquante

ans, Éléonore de Gonzague; ce mariage fut encore sa résultats, et François-Marie précéda Cosme au tombeau. Ce malheureux prince vit alors les principales puissances de l'Europe disposer de ses États, de son vivant et de celui de son fils; ce fut en vain qu'il fit valoir les droits de la république florentine, dont les Médicis n'étaient que les représentants, qu'il tenta d'assurer son héritage à sa fille, qu'il demanda enfin à choisir lui-même son successeur parmi les prétendants à la couronne de grand-duc; le sort de la Toscane fut réglé sans sa participation. Il mourut abreuvé de dégoûts (1723); son fils, Jean-Gaston, mourut quatorze ans plus tard, après un règne déplorable (1737). La Toscane échut alors à l'époux de Marie-Thérèse, François, duc de Lorraine, qui n'y fil qu'un séjour de courte durée. A la mort de ce prince, dévenu empereur, son second fils, Léopold, âgé de dix-huit ans, eut en partage Florence et le grand-duché (1665). Appelé au trône impérial par la mort de son père, Joseph II (1790), Léopold laissa la Toscane à son second fils, FerdinandJoseph, qui les céda (1801) au duc de Parme, devenu roi d'Étrurie. La Toscane fut heureuse sous le gouvernement éclairé des princes de la maison de Lorraine.

Royaume des Deux - Siciles. Ce royaume ayant été déclaré indépendant de la couronne d'Espagne par le traité de 1718, l'infant don Carlos, depuis Charles III à Madrid, fut appelé à le gouverner. Le roi Ferdinand VI étant mort sans héritiers directs (1759), Charles, son frère, quitta le trône de Naples pour celui d'Espagne, et déclara roi des Deux-Siciles son troisième fils, Ferdinand, à peine âgé de neuf ans. Pendant la minorité de celui-ci et même longtemps après, Charles III continua d'exercer une influence salutaire sur le gouvernement de Naples. Ferdinand IV régnait encore lorsque sa capitale fut envahie par les Français (1798).

Etats de l'Eglise. -Clément XI (AIbani) régna de 1700 à 1721; mêlé, malgré lui peut-être, aux discussions des jansénistes, il fut auteur de la fameuse constitution unigenitus, qui eut lant de retentissement en

France. Innocent XIII (Conti), qui lui succéda, eut la faiblesse de donner le chapeau de cardinal à l'abbé Dubois, ministre du régent de France. A sa mort, arrivée en 1724, Benoît XIII (Orsini) fut élu souverain pontife; affaibli par les années, Benoît laissa impunies, pendant les six années de son règne, les exactions du cardinal Coscia de Bénévent. Clément XII (Corsini) porta la tiare pendant dix ans (1730-1740), et vit ses États ravagés par les armées étrangères; il eut la générosité de rendre à la république de Saint-Marin l'indépendance que lui avait enlevée le fameux cardinal Alberoni, devenu légat de Romagne.

Benoît XIV (Lambertini), qui monta sur le trône après Clément XII, fut le plus ver"tueux, le plus éclairé et le plus aimable des pontifes romains; il eut la sagesse de recon"naître que la marche de l'esprit humain avait borné la puissance temporelle des papes à leurs États, et que leurs armes spirituel les étaient émoussées. Sa sagesse et son économie remédièrent aux malheurs qui avaient accablé ses sujets; il accorda aux beaux-arts une protection éclairée, et signala son règne par d'utiles entreprises, telles que le desséchement des Marais-Pontins, la restauration des routes, etc. Lorsqu'il mourut (1758), les hommes de toutes les religions Jui donnèrent des larmes, Rome tout entière assista à ses funérailles, et l'Europe fut affligée de cette perte comme d'une calamité Juniverselle.

Clément XIII (Rezzonico), qui vint après, fut recommandable par la pureté de ses mœurs et par son zèle pour la religion; mais il fut loin d'avoir la prudence et la sagesse de son prédécesseur; il se brouilla avec les trois souverains de la maison de Bourbon, par suite de ses prétentions sur le duché de Parme, et cette querelle prenait un caractère inquiétant pour lui quand il mourut presque subitement (1769). Clément XIV (Ganganelli) fut l'émule de Benoît XIV; il apaisa par sa modération les démêlés qu'avait fait naître l'imprudence de son prédécesseur; après un mûr examen, il publia (1773) le bref qui supprimait les jésuites, et mourut l'année suivante, d'une maladie que la haine

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Pie VI (Braschi) lui succéda; il fit un voyage en Allemagne près de l'empereur Joseph II, dans le but d'engager ce monarque à arrêter ses réformes trop précipitées (1782). Pie VI mérita des louanges pour s'être occupé avec zèle de l'administration de ses États; mais on eut à lui reprocher sa prodigalité; il fit revivre le népotisme, el son neveu, le duc Braschi, acquit des richesses immenses aux dépens du pays. Pie VI vit tomber sa capitale au pouvoir des Français, et vint mourir en France (1799).

Venise, Gènes, Lucques. La république de Venise resta tout-à-fait étrangère aux guerres de ses voisins; elle conserva une neutralité absolue, et son histoire n'aurait laissé aucun souvenir pendant le dixhuitième siècle, si les Turcs ne lui eussent enlevé la Morée, que son imprévoyance et l'infidélité de ses agents avaient laissée sans défense. La paix de Passarowitz (1718) compléta le sacrifice de cette belle province, qui fut définitivement perdue pour les Vénitiens.

La république de Lucques prit encore moins de part aux événements du siècle. Gènes, écrasée sous le joug d'une odieuse oligarchie, partageait la faiblesse et la décadence du reste de l'Italie, lorsque tout-àcoup elle déploya une vigueur inattendue. Elle avait embrassé la cause française dans la guerre de la succession d'Autriche; abandonnée de ses alliés, elle vit les Autrichiens arriver à ses portes; déjà même ils avaient pénétré dans la ville; par un acte d'héroïsme désespéré, elle les chassa et recouvra son indépendance (1746). Les exactions des gouverneurs génois firent révolter la Corse; après de vains efforts pour réduire les rebelles, la république céda cette île à la France (1768) en payement des sommes qui lui avaient été prêtées pour la soumettre.

Deux personnages célèbres, mais à des titres bien différents, figurèrent dans la guerre des Corses contre les Génois : l'un,

aventurier allemand, est connu sous le nom du roi Théodore; l'autre est Paoli, héros à manière antique, qui, s'il n'affranchit pas sa patrie, soutint du moins une lutte glorieuse. Paoli, dans sa vieillesse, prédit la grandeur future d'un jeune officier son parent c'était Napoléon.

Telle qu'elle était, partagée entre les les Bourbons possesseurs de Naples, de la Sicile, de Parme et de la Corse, les Autrichiens maîtres de Mantoue et de Milan, la maison de Lorraine souveraine en Toscane, et deux républiques qui avaient perdu toute leur énergie, l'Italie n'avait, quand la révolution française gronda à ses portes, ni la volonté ni la force de constituer et de défendre son indépendance. Elle devint de nouveau l'un des champs de bataille où se décidèrent les grandes questions qui agitaient l'Europe: indifférente elle-même à toutes les querelles qui inondaient de sang ses campagnes, et ne sachant à qui elle devait souhaiter la victoire.

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La révolution avait commencé en France; elle menaçait tous les États de l'Europe: le roi de Sardaigne, que le voisinage exposait le plus au danger, engagea les autres souverains de l'Italie à une alliance défensive pour repousser toute agression ou même toute influence étrangères. L'Autriche, maîtresse du Milanais, accueillit cette proposition; le roi de Naples y accéda, quoique moins ouverte ment; le pape lui-même, indigné des outrages faits à la religion par les révolutionnaires français, eut recours aux armes temporelles. Mais la république de Gènes ne prit aucune attitude hostile, et Venise persista dans son système pacifique : la première craignait de compromettre son commerce et les nombreux capitaux qu'elle avait chez ses voisins; la seconde n'avait rien à craindre de

la France, et avait tout à redouter de l'Empire.

Les troupes de la république française entrèrent pour la première fois en Savoie au mois de septembre 1792, et y plantèrent l'arbre de la liberté; repoussées en 1793 par les Piémontais et par les Autrichiens réunis, elles y rentrèrent vers la fin de la même année, et parvinrent à s'y maintenir. La Convention nationale avait déclaré la guerre au roi de Naples dès le mois de février. Au mois d'avril 1794, les Français avaient pénétré dans le Piémont et dans les États de Gènes; ils furent forcés de se retirer l'année suivante devant les Autrichiens, les Napolitains et les Piémontais. En 1796, le commandement de l'armée d'Italie fut donné au général Bonaparte (1); quelques mois après, le roi de Sardaigne, pour prix de la paix que la France lui accordait, cédait à la république le duché de Savoie avec le comte de Nice, et recevait des garnisons françaises dans ses places fortes. Les Autrichiens restaient à combattre au mois d'août de l'année suivante, ils étaient chassés de l'Italie, el l'avant-garde de l'armée française était arrivée sur le Simmering, dernière hauteur des Alpes noriques, à vingt lieues de Vienne, dont elle pouvait voir les clochers. La cour d'Autriche, épouvantée, demanda la paix; les préliminaires en furent signés à Léoben (18 avril 1797). L'article 1er reconnaissait la république française. « Effacez cela, dit fièrement le vainqueur, « la répu»blique française est comme le soleil; tant » pis pour les aveugles qui ne la voient pas. » l'empereur renonça aux Pays-Bas et à la Lombardie, et reconnut les nouvelles répu bliques fondées en Italie (la Cispadane, comprenant le duché de Modène, les deux Légations et la Romagne, et la Cisalpine, composée du Milanais); il recevait, en dédommagement de tous ces sacrifices, les Etats vénitiens de terre-ferme, c'est-à-dire l'Illyrie, l'Istrie et la Haute Italie jusqu'à l'Oglio. Venise, de son côté, était indemni

(1) Nous pensons qu'il est inutile d'entrer dans aucun détail sur les mémorables campagnes d'ltalie; elles doivent être présentes au souvenir de tous nos lecteurs.

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