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de la jonction, et que, par elle-même, la déter

mination en étoit instante.

Le premier eut pour objet la nomination de deux trésoriers de la bourse commune des deux corps réunis. Par le pénultième des douze articles de la jonction, il étoit dit : Que les deniers de la bourse seroient maniés par un peintre et un sculpteur qui seroient nommés par lesdits deux corps, et que ces deux trésoriers compteroient tous les mois et seroient changés tous les ans ; cette stipulation laissoit la liberté de choisir ces officiers dans l'un ou l'autre de ces corps indistinctement, puisque, dans les termes qu'elle étoit conçue, elle n'assujettissoit pas à en prendre un dans l'Académie et un chez les maîtres. Le secrétaire se prévalut encore dans cette circonstance, et, par un trait d'habileté digne de lui, glissa dans son discours les noms de MM. Errard et Guillain. C'étoient deux hommes d'une probité rare et reconnue universellement. Quoique tous deux fussent de l'Académie, ils étoient en telle considération dans toute la maîtrise, que nul d'entre les siens n'osa contredire au petit brouha d'approbation générale qu'excita dans l'assemblée la seule idée d'un si digne choix. Aussi, quelque répugnance qu'y purent avoir les avides partisans des anciens abus, il ne laissa point d'être admis avec toutes les apparences de la plus parfaite unanimité.

L'autre point sur lequel le secrétaire proposa ensuite qu'il fût statué regardoit l'arrangement des fonds nécessaires pour subvenir à l'entretien de l'école académique. Aux termes de l'art. 3 de ceux de la jonction, tous les enfants des maîtres et des académiciens devoient être reçus à dessiner à l'Académie sans rien payer. C'étoit une ressource de moins pour notre école, à laquelle il falloit nécessairement suppléer d'ailleurs. L'assemblée y pourvut au moyen d'une légère contribution, qu'elle ordonna être levée sur les deux compagnies également. Toute modique que fût cette contribution, elle fut jugée suffisante pour opérer et assurer l'exercice gratuit de l'école académique, non seulement pour les enfants des maîtres et des académiciens, mais encore pour ces académiciens et ces maîtres eux-mêmes. La délibération sur ce second point se passa aussi d'une manière très paisible et avec un grand extérieur de bienveillance réciproque pour l'intérêt et l'honneur de la jonction.

Ceux des académiciens qui la regardoient comme leur ouvrage, et qui conséquemment se passionnoient pour sa réussite, en conçurent de grandes espérances sur des commencements en apparence si heureux. Ils ne réfléchissoient pas assez sur le peu de fonds qu'il y a à faire sur ces dehors affectueux dont abonde d'ordinaire toute nouvelle

association. Ils jugeoient des sentiments de la jurande par les leurs. Elle étoit bien éloignée de renoncer aux siens, et, si elle copioit un peu dans cette occurrence le dehors de ceux de ces hommes vertueux, ce n'étoit que pour parvenir à ses fins, et plus sûrement et plus promptement. L'on eut bientôt lieu de s'en convaincre. Cet esprit de souplesse dont elle s'étoit revêtue n'ayant pas produit tout d'abord l'effet qu'elle en avoit espéré, qui étoit de la rendre la maîtresse des affaires, et surtout de la bourse, elle ne tarda pas à recourir à ses premières armes. Ce n'étoit que dans le trouble qu'elle pouvoit s'en servir avec une certaine utilité pour ses intérêts. Elle ne songea donc plus qu'au moyen de le substituer sans délai à ces premières lueurs de paix, au charme desquels les trop simples promoteurs de la jonction se livroient si bénignement.

Le premier de ces moyens dont elle s'avisa fut d'attaquer M. de Charmois en sa qualité de chef de l'Académie, mais de propos si messéants et même si injurieux que, pour y parer sans retour, il se rendit chez les mêmes notaires qui venoient de passer l'acte de transaction, et y fit cette déclaration, qu'il n'entendoit se servir de sa qualité de chef de l'Académie pour s'immiscer aux affaires des maîtres, ni se dire leur chef. Il fit cette démarche le 29 du même mois qu'avoit été con

clu et signé le contrat de jonction, et avant même qu'elle eût été consommée pleinement par la ratification de tous les maîtres, puisque plusieurs ne la firent que deux jours après. La seule date de cette première altercation suffit à prévoir les suites et le sort du nouvel accommodement.

M. de Charmois, en même temps qu'il fit cette espèce de désistement, étoit bien résolu de ne se plus trouver aux assemblées de la jonction, et ne se trouva point en effet à la première qui se tint immédiatement après. Les principaux d'entre les chefs de l'Académie en conçurent un véritable déplaisir, et y représentèrent avec tant de force les inconvénients de cette retraite et l'injustice des procédés qui y avoient donné lieu, qu'ils couvrirent de confusion ceux qui en étoient les auteurs. Ceux-ci essayèrent d'abord à rendre compte de leur conduite; mais, comme ils s'aperçurent d'un murmure assez général de désapprobation et de mécontentement, ils prirent le parti de recourir à la droiture de leurs intentions, au cas que l'on trouvât qu'ils pussent avoir quelque tort d'ailleurs. Cette palinodie acheva de ranger tous les esprits au parti de la raison et du devoir. Les bien intentionnés saisirent ce moment pour demander qu'il fût fait à M. de Charmois une satisfaction convenable sur ce qui venoit de se passer à son sujet; personne ne contredisant à la proposition

l'on nomma à l'instant des députés, tirés de l'une et de l'autre compagnie, pour aller, au nom du corps réuni, faire des excuses à M. de Charmois, et le prier de venir en l'Académie prendre sa séance ordinaire. La députation, étant composée avec attention, remplit les intentions de ses commettants avec beaucoup de politesse et avec ces marques d'un attachement vif et sincère qui rarement manquent de produire leur effet. M. de Charmois en fut touché, promit de se trouver en la prochaine assemblée, et tint parole.

Soit qu'il crût ramener plus parfaitement les jurés en flattant leur vanité, ou par un simple mouvement d'honnêteté échappé sans réflexion, et qui du moins n'avoit été concerté avec personne, M. de Charmois fit, dans cette séance, une chose qui devint bientôt un germe de litige de plus entre les deux corps. Il fit asseoir à sa droite les quatre jurés en charge de la maîtrise. Tous les autres assistants, de l'une et l'autre compagnie, qui formèrent cette assemblée, se placèrent ensuite sans rechercher ni affecter aucun rang marqué. Cette espèce de préséance qui venoit d'être assignée aux jurés ne fut relevée par aucun des académiciens. Presque tous la regardèrent comme une rencontre fortuite, ou du moins comme une disposition faite sans autorité suffisante, et qui ne pouvoit tirer à conséquence pour l'avenir. Ceux

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