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L'histoire de l'Académie de peinture que nous publions, et qui étoit restée inédite, existe au département des manuscrits de la Bibliothèque impériale. Elle est contenue dans un volume in-4° de 576 pages, relié en maroquin rouge plein, aux armes de France, et porte, dans le supplément françois, le n° 339. L'exécution du manuscrit ne remonte pas au delà de la première moitié du dixhuitième siècle, et même l'on y reconnoît la main, soit de M. Hulst, l'un des amateurs honoraires de l'Académie, soit plutôt, à cause des fautes matérielles, celle d'un copiste employé par lui; c'est en tout cas, nous affirme M. Dussieux qui est à même d'en juger, celle de ses notices et de ses travaux conservés dans les archives, trop peu connues et trop fermées, du palais des BeauxArts. Il a d'ailleurs été offert au dépôt dans lequel il est conservé par M. Hulst lui-même, ainsi qu'il résulte de cette mention précieuse inscrite sur un des premiers feuillets de garde: « Donné à la Bibliothèque du Roy par M. Hulst, le 8° novembre

1745. » L'auteur n'est pas plus nommé dans l'ouvrage que sur le titre; c'est à lever cet anonyme que cette préface sera surtout consacrée.

A voir d'abord ce volume ainsi matériellement contemporain de M. Hulst, copié pour lui et donné par lui, la première pensée seroit de lui en attribuer la rédaction. Mais, outre qu'il seroit singulier que cette histoire n'allât pas jusqu'à son temps, l'on est bientôt amené à reconnoître que non seulement l'auteur étoit de l'Académie, mais qu'il étoit peintre et en faisoit partie dès la formation. En effet, il se sert toujours de la forme personnelle, notre corps, nos adversaires; il s'adresse à ses collègues futurs, il parle de l'honneur de son art, et, parlant des faits dont il a cru devoir rendre compte, il ajoute, pour donner toute autorité à son témoignage : « Il n'en est aucun qui » ne me soit passé sous les yeux, ou dont je n'aie >>> eu une connoissance particulière et de la plus » indubitable sûreté. » Il est par là hors de doute, surtout en se reportant à l'abondance des détails donnés par lui sur les commencements de l'Académie, qu'il en fit partie dès 1648. Cela met encore hors de cause, malgré leur qualité d'historiographes de l'Académie, deux autres de ses membres connus comme écrivains, Guillet de Saint-Georges et Félibien, mais qui n'y sont entrés, l'un qu'en 1682, et l'autre qu'en 1667.

Ainsi, puisque l'auteur dit avoir tout vu dès les commencements, il le faut entendre d'un homme qui a été, non pas un des membres admis, mais un des formateurs, et, une fois qu'on est ainsi restreint aux douze anciens et aux douze acadé

miciens de 1648, une première élimination se présente, celle de ceux qui sont morts avant 1664. Par là, nous avons de moins François Perrier et Pierre Van Mol, morts en 1650; Thomas Pinagier, en 1653; Eustache Le Sueur et Louis Testelin l'aîné, en 1655; Laurent de la Hyre, en 1656; Simon Guillain et Hans van den Bruggen, en 1658; Du Guernier, en 1659; Jacques Sarrazin et Mathieu de Plate-Montaigne, en 1660. Corneille le père est mort le 3 juin 1664: il ne faut pas non plus s'en occuper.

Dix noms, sur vingt-quatre, étant ainsi mis hors de cause, il en reste quatorze à examiner. De ce nombre, et bien qu'ils aient vécu postérieurement, personne, je pense, ne s'étonnera de voir retrancher Gérard van Opstal, mort en 1668; Sébastien Bourdon, en 1671; Juste d'Egmont, Louis de Boullongne, Philippe de Champaigne, morts en 1674; Henri de Beaubrun, en 1677; Gérard Gosuin, en 1685; Henri Mauperché, en 1686; Samuel Bernard, en 1687; Ferdinand Elle, en 1689'; et Gilbert de Sève, en 1698. Tous ces artistes, dont plusieurs sont étrangers, et par là ne doivent pas avoir eu de la langue françoise la connoissance littéraire nécessaire pour penser à l'écrire pour le public, n'ont, jusqu'à preuve contraire, rien qui les puisse recommander sur ce point à une attention particulière; aucun d'eux n'a laissé de livres et n'est connu pour avoir écrit. Charles Errard et Le Brun, morts, l'un en 1690, l'autre en 1691, sont encore plus facilement rejetés : le premier à cause du blâme souvent exprimé sur sa conduite; le second, au contraire, à cause de l'éloge perpétuel

de son génie, de ses actes et de sa personne. Le peu de temps que lui laissoient ses immenses travaux seroit déjà une raison suffisante, et il n'avoit d'ailleurs pas à se donner des louanges que lui prodiguoient à l'envi ses amis et ses admirateurs. Il ne reste donc plus qu'un seul nom, celui d'Henry Testelin le cadet, le seul aussi que l'on connoisse comme écrivain.

Henry Testelin, de Paris, né un an après son frère Louis, fut de l'Académie en même temps que lui, c'est-à-dire à la formation, et le remplaça comme secrétaire le 27 juillet 1650, c'està-dire deux ans seulement après la naissance de l'Académie. La qualité de professeur, qui lui fut conférée six ans plus tard, le 7 octobre 1656, ne l'empêcha pas de continuer les mêmes fonctions, qu'il remplit pendant trente et un ans, jusqu'en 1681, époque où la révocation de l'édit de Nantes le mit dans l'alternative de sortir de France ou d'abjurer la religion protestante, dont il faisoit profession. Comme il y persista, il fut destitué le 10 octobre 1681 pour être remplacé par Nicolas Guérin, et dut ne pas tarder à passer en Hollande, où il paroît s'être établi à La Haye, puisqu'il y mourut, le 17 avril 1695, à l'âge de quatre-vingts ans. Comme peintre, il n'y a pas beaucoup à en dire. Guérin, dans sa description des salles de l'Académie, nous décrit les tableaux qu'elle conservoit de lui: un portrait du roi à l'âge de douze ans, un autre portrait du roi plus grand que nature fait en 1665 (1), et le portrait du chancelier

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(1) C'est sans doute le portrait du roi qui fut donné

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