» Des Troyens dévoués suivra partout tes pas. Trouble sur son trépied la prêtresse en fureur. La » J'ai tout prévu; mais vous, exaucez ma prière ; >> Puisque s'ouvre en ces lieux la porte de Pluton, » Que ce lac communique au sombre Phlégéthon, >> Que d'un père chéri je revoie au moins l'ombre: » Vous-même guidez-moi dans cet abîme sombre. » Hélas! parmi les morts, et le fer et les feux, >> Tout fier de me courber sous ce poids glorieux, » Et des traits ennemis évitant la poursuite, » A la Grèce en fureur j'échappai par la fuite; » Et lui, foible et penché sous le fardeau des ans, » Sous un ciel orageux, sur les flots menaçans, » Accompagnant son fils sur des rives lointaines, » Partageoit à la fois, et consoloit mes peines. » Son ordre exprès m'envoie à vos sacrés lambris; Ayez pitié du père, ayez pitié du fils! » Hécate sur ces lieux vous remit sa puissance : » Ne trahissez donc point ma pieuse espérance. >> Orphée a pu jadis, grâce à ses doux accords, >> Descendre encor vivant dans l'empire des morts. » Tour à tour revoyant, et perdant la lumière, >> Pollux aux bords du Styx va remplacer son frère. » Conterai-je Thésée, Alcide, et tous les noms » Des demi-dieux admis dans ces gouffres profonds? » Comme eux, de Jupiter j'ai reçu la naissance: » Ayant les mêmes droits, j'ai la même espérance. » Ainsi le fils des dieux, une main sur l'autel, Demande une faveur au-dessus d'un mortel. La prêtresse répond : « O l'espoir de ta race! » Sais-tu bien ce qu'ici demande ton audace? » Il n'est que trop aisé de descendre aux enfers, » Les palais de Pluton nuit et jour sont ouverts; » Mais rentrer dans la vie, et revoir la lumière, » Est un bonheur bien un vœu bien téméraire. rare, » Qu'à peu de favoris, issus du sang des dieux. » Le passage est fermé par des forêts profondes, » Le Cocyte à l'entour roule ses noires ondes. » Mais si tels sont tes vœux, si ton pieux amour » Veut passer l'Achéron qu'on passe sans retour, Écoute mes leçons dans la nuit ténébreuse, >> >> Dont un bois vaste entoure une vallée ombreuse, » D'un rameau précieux se cache le trésor; » L'or brille sur sa tige, et son feuillage est d'or. » Là, préside des dieux l'auguste souveraine; » Mais nul ne peut percer cette nuit souterraine, >> Qu'il n'ait de ce rameau cueilli le riche don » Que demande en tribut l'épouse de Pluton. » On a beau l'arracher au tronc qui le possède, » Soudain un rameau d'or au rameau d'or succède, » Et, toujours reproduit, le précieux métal » Rend à l'arbre immortel son luxe végétal. » Toi donc, perçant des bois la nuit silencieuse, » Va chercher, va cueillir la branche précieuse: » Si dans les sombres lieux t'appelle le Destin, » Docile, d'elle-même elle suivra ta main : » Autrement, aucune arme, aucune main mortelle »Ne pourroit triompher de sa tige rebelle. » C'est peu tandis qu'ici tu consultes les dieux, » De l'un de tes amis la mort ferme les yeux, » Et souille tes vaisseaux de ses vapeurs funestes. » Dans l'asile des morts va déposer ses restes, → Offre une brebis noire aux noires déités, Que ces premiers devoirs soient d'abord acquittés : » Alors, tu pourras voir, au gré de ton envie, » Ces lieux où la mort règne, et qu'abhorre la vie. » Elle dit. Le héros, le cœur préoccupé, D'étonnement, de crainte, et de respect frappé, Si le dépit est fait pour les ames des dieux, Le plonge entre les rocs, sous la vague écumeuse; Et, plongeant ses regards dans la forêt immense: prouve trop combien sa parole est certaine; » Et le Destin, toujours trop fécond en douleurs, » Ne m'a jamais en vain annoncé des malheurs.»> Comme il disoit ces mots, deux colombes légères, De la belle Cypris agiles messagères S'abattent sur la terre; et son regard surpris |